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Eloge de l'Art par Alain Truong
28 août 2009

Grandi Legni d’Andrea Branzi @ Galerie Azzedine Alaïa

Paysage

Grandi Legni 02 d’Andrea Branzi, Italie 2009. Édition Design Gallery Milano & Galleria Nilufar. Structure en poutres anciennes avec découpes, encastrements et colorations réalisés à la main. Meubles conteneurs en mélèze massif avec reproduction d’une fresque et réalisation d’une micro mosaïque romaine sur les portes respectives. 320 x 28 x h. 270 cm.
Voir Philoctète blessé, fresque (détail), 50 x 85 cm. Pompéi, II° siècle av. J.C. Masque, micro mosaïque romaine, 50 x 72 cm. Pompéi, II° siècle av. J.C.

L’exposition Grandi Legni d’Andrea Branzi sera inaugurée le 10 décembre à 19h00 à la Galerie Azzedine Alaïa, 18 rue de la Verrerie. Grandi Legni est une collection de pièces uniques réalisées par Design Gallery Milano et Nilufar. L’exposition sera ouverte jusqu’au 17 janvier 2010, tous les jours, de 10h30 à 19h00. Le catalogue est publié en italien et en anglais.

Grandi Legni appartient à une phase récente d’un long travail d’expérimentation d’Andrea Branzi, à la recherche des archétypes environnementaux sur lesquels reposent les icônes de la complexité linguistique du monde contemporain : des traces de l’histoire, de la technologie, de l’art moderne et antique. Des objets qui se situent à mi-chemin entre des installations d’architecture en bois et des objets d’usage quotidien. Par rapport à l’évolution du design contemporain, qui semble prisonnier de sa perfection formelle et de son autoréférentialité, les « Grandi Legni » représentent une issue vers des territoires anthropologiques plus profonds, dans la magie, dans le mythe, presque des présences mystérieuses, qui parlent un langage primordial mais tout à fait original. Il s’agit d’objets-structures appartenant à un monde où les oeuvres de l’homme conversent avec les milieux de la profondeur, des grandes narrations, de la religion, de la nature, du temps qui passe. A propos de Grandi Legni, Branzi parle en effet de « racines animistes », d’objets dotés d’une âme ; il s’agit de la faire émerger, et le design contemporain n’y arrive pas toujours, au contraire, il l’annule souvent.

« Le rapport entre l’homme et les objets est un rapport opaque, tout n’apparaît pas à la lumière du jour. Certains objets portent bonheur, d’autres non. La culture du projet a perdu cette capacité charismatique et, en présence d’un milieu de plus en plus aseptique et anonyme, ce sont les objets qui se chargent de ce témoignage, grâce à leur fonction chamaniste de connecter la réalité quotidienne à une dimension plus profonde et inexplorée ». (Andrea Branzi)

D’où le choix de Branzi de puiser dans un répertoire iconologique d’images historiques, familières même lorsqu’on en ignore l’origine. C’est en puisant dans l’histoire et dans la géographie de l’homme que l’on peut donner naissance à une accélération de densité, non en l’annulant. La fonction des grands bois, selon Branzi, est d’être portante, de soutenir, d’endurer la fatigue. « Les bois sont les bases de l’Europe », c’est la base sur laquelle s’est construit le paysage humain dans son déroulement historique. Il suffit de penser aux pilotis qui constituent les fondations de Venise, à la structure interne de Paris, au support de tous les territoires agricoles. La production des Grandi Legni a comporté la recherche de poutres anciennes en Val Badia, l’utilisation d’une nouvelle technologie d’impression 3M, la réalisation de marqueteries de pierres dures florentines et de micro mosaïques de l‘École de Spilimbergo, l’utilisation de matériaux pauvres comme la clôture métallique utilisée pour les poulaillers…

La collection est produite à quatre mains par Mario Godani de Design Gallery Milano qui a derrière lui une longue fréquentation avec les maîtres du design contemporain, et par Nina Yashar de la Galerie Nilufar, un nom affirmé au niveau international dans le scouting et la promotion d’auteurs qui travaillent dans la zone de frontière entre art contemporain et design. Leur rencontre – un fait plutôt rare dans le monde du design – se base sur la reconnaissance de la valeur réciproque et sur les affinités électives pour affronter des projets visionnaires.

Andrea Branzi, architecte et designer, est né à Florence en 1938, où il obtient une maîtrise en 1967. De 1964 à 1974, il a fait partie du groupe Archizoom Associati, l’un des premiers groupes du « mouvement radical » dont les projets sont conservés au Centre d’Études et d’Archives de la Communication de l’Université de Parme et dans la Collection Historique du Centre Georges Pompidou de Paris. Il s’est toujours occupé de design industriel et expérimental, d’architecture, de projet urbain, de didactique et de promotion culturelle. Il est l’auteur de nombreux livres sur la théorie du projet contemporain et sur l’histoire du design italien, qui ont été publiés dès les années 80 en Italie, en Angleterre, en France et aux Etats-Unis. En 1982, il a fondé Domus Academy, première école internationale postuniversitaire de design. De 1986 à 1991, il a fait partie du Conseil d’Administration de l’École Supérieure de Design Les Ateliers de Paris, et du groupe de travail pour le développement du design en France. Il est professeur Titulaire à la Faculté de Design de l’Ecole Polytechnique de Milan. Il a été Curateur Scientifique du Design Museum de la Triennale de Milan de 2006 à 2009. En 2007, il a reçu la Licence Honoris Causa à l’Université Sapienza de Rome et a été nommé membre Honoraire du Royal Design for Industry, ainsi que membre du Conseil pour le Design du Ministère de la Culture italien. Andrea Branzi vit et travaille à Milan.

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