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Eloge de l'Art par Alain Truong
3 janvier 2010

Importante commode. Estampille de JOSEPH entre deux fleurs de lys et marque J.M.E. Epoque Louis XV vers 1755.

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Importante commode. Estampille de JOSEPH entre deux fleurs de lys et marque J.M.E. Epoque Louis XV vers 1755.

de forme galbée en laque du Japon, elle présente en façade et sur les deux côtés des paysages animés d'oiseaux exécutés en laque or sur fond noir avec quelques incrustations de Burgau. Le décor sur le devant forme trois panneaux dans des encadrements de bronze ciselé et doré à volutes et feuilles d'acanthe.
Elle ouvre par deux tiroirs sans traverse et repose sur quatre pieds cambrés.
La très riche ornementation de bronzes ciselés et dorés se compose d'un large encadrement à motifs de rocailles bordant les tiroirs et les côtés, de moulures contournées de guirlandes de feuillages et d'un tablier à motif de coquille centrale encadré de rinceaux et de rocailles.
Les montants sont garnis de chutes finement ouvragées reliées aux sabots par une descente à feuillages.
Dessus de marbre Portor à bec de corbin souligné d'une gorge.

Estampille de JOSEPH entre deux fleurs de lys et marque J.M.E. J.M.E poinçon de Jurande des Jurés Menuisiers Ebénistes en usage au XVIII° siècle.
H 83, L 140,5, P 62 cm - H 86, L 148,5, P 67,5 cm (avec le marbre). Adjudication : 1 350 000 €

JOSEPH BAUMHAUER dit JOSEPH: « Ebéniste privilégié du Roi » est natif d'Allemagne. Très jeune il s'installe à Paris et fait partie des grands ébénistes parisiens du temps de Louis XV et de la Marquise de Pompadour. Son oeuvre exceptionnelle se distingue par la qualité et la rareté de sa production. On les retrouve dans les grandes collections privées et dans les musées de Londres où le Victoria and Albert Museum conserve une commode similaire (cf. Pierre Kjellberg « le mobilier français du XVIIIème siècle » page 453 et une autre au Paul Getty Museum de Los Angeles U.S.A.).
Il est actif jusqu'en 1772.
Selon Pierre Kjellberg, Joseph et Bernard II Van Risen Burgh (BVRB) se partageaient la première place dans la hiérarchie des ébénistes parisiens du règne de Louis XV. Cependant, Joseph ayant travaillé moins longtemps, sa production fut moins abondante. Cela implique que ses oeuvres sont beaucoup plus recherchées car beaucoup plus rares. Cette dernière idée est confirmée par le fait que les musées français ne possèdent pas de meubles de Joseph d'une telle qualité.
Joseph et BVRB travaillaient pour les mêmes marchands-merciers tels Darnault, Duvaux ou Hébert qui revendaient leurs meubles à des particuliers et à la Couronne. Ces marchands-merciers très actifs à partir du début du XVIII° siècle estampillaient ou marquaient souvent de leur nom les meubles qu'ils vendaient.
Ils étaient également estampillés par l'ébéniste lui-même et pouvaient porter un autre type de marque: la marque JME; qui permettait de contrôler que l'ébéniste avait bien payé une taxe à la Jurande des Maîtres Ebénistes ce qui est le cas de notre commode.
Il a pu arriver que la famille royal passa directement commande auprès de certains ébénistes, et c'est le cas pour Joseph Baumhauer. Dans ce cas ci, le meuble portait la marque du château où il était conservé et un numéro d'inventaire sauf si le Roi ou la Reine payait sur leur cassette personnelle; il ne portait alors aucune marque officielle autre que celles déjà mentionnées.
De plus, Joseph fut nommé « ébéniste privilégié du Roi » en 1767 ce qui signifiait qu'il travaillait exclusivement pour la Couronne et que l'administration du royaume l'autorisait à travailler hors les règles de la corporation des menuisiers-ébénistes dont il ne fit jamais partie.
Il dépendait donc de la Prévôté de l'Hôtel 2, d'où les fleurs de lys encadrant son estampille. En l'espèce, notre commode porte l'estampille de Joseph et la marque de la Jurande des Maîtres Ebénistes.
Il est alors très tentant vu la qualité et le caractère extraordinaire de la ciselure des bronzes et de leur décor, et de celle du laque, de penser que cette commode a pu appartenir à une personnalité de l'entourage royal. L'absence de marque de machand-mercier en l'espèce porte à croire qu'elle fut payée sur la cassette personnelle d'un membre de la famille royale, ce qui expliquerait également l'absence de marque d'inventaire ou de château.Si nous nous attardons un moment sur les bronzes, il convient de signaler un élément imporrrrrrrtant en ce qui concerne Joseph et qui vient une fois de plus expliquer le caractère exceptionnel de notre commode. Ainsi, Joseph utilisait des bronzes d'un modèle original qui furent ensuite utilisés par ses confrères.Ils lui étaient fournis par des marchands-merciers qui furent sans doute les mêmes qui lui fournirent des panneaux de laque de grande qualité, comme le souligne Thibaut Wolvesperges. Ces bronzes s'harmonisent parfaitement avec le décor du laque; un échange de mouvements et de matières, alliant beauté et fonctionnalité comme l'illustre notre meuble. Les laques du Japon de cette commode sont facilement reconnaissables comme faisant partie du Pictorial Style de 1630 à 1690 puis de 1690 à 1730, le marché japonais concurrencé par le marché chinois ayant dramatiquement diminué à partir de 1690 et n'exportant pratiquement plus depuis cette date. Nous pouvons comparer à ce titre un pot en laque du Japon du Pictorial style présentant un arbre et des branchages à notre commode car ils sont interprétés de la même façon que sur le panneau central de notre commode (cf. O. IMPEY et C. JÖRG, Japanese export lacquer 1580-1850, éd. Hoteeei, p. 118). Le Pictorial style est picturalement très créatif, très libéré des formes et très inspiré. Des arbres torturés, des animaux féériques et des eaux marquées par des « S » infinis habitent ces lieux magiques.Il ne nous reste de Joseph que très peu de meubles en laque mais d'une qualité exceptionnelle ce qui conduit à penser qu'il s'était spécialisé dans la production de meubles luxueux.

Bibliographie :-Pierre KJELLBERG, Le mobilier français du XVIII° siècle. Dictionnaire des ébénistes et des menuisiers, éditions de l'amateur.-Thibaut WOLVESPERGES, Le meuble français en laque au XVIII° siècle, éditions de l'amateur.-Pierre VERLET, Le mobilier royal français, éditions Picard, Tomes I, II, III, IV.-Jean NICOLAY, L'art et la manière des maîtres ébénistes français au XVIII° siècle, éditions Pygmalion.-Oliver IMPEY et Christiaan JÖRG, Japanese export lacquer 1580-1850, éditions Hotei.L'estampille de Joseph est reproduite dans l'ouvrage du Comte François de Salverte, Les ébénistes du XVIIIème siècle, leurs oeuvres et leurs marques, édition 1934.

Giafferi - Paris. Vente du Vendredi 2 octobre 2009 www.giafferi.auction.fr

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